La Nef, référence de la finance éthique en France, lance en 2021 le podcast Prêt à tout pour accompagner les entrepreneurs du monde de demain dans le financement de leur projet. Pour le quatrième épisode, Antoine, banquier itinérant en Île-de-France, prend le micro pour échanger sur « Pourquoi les capitaux propres sont-ils décisifs ? ». Il est parti à la rencontre de Julien Delcey, directeur général de Sinny & Ooko, société créatrice de tiers-lieux culturels tels que La Cité Fertile.
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Références de l’épisode
- Sinny&Ooko et La Cité Fertile
- Zeste par la Nef : plateforme de financement participatif de la Nef. Elle est dédiée aux aux professionnels à impact et propose de formules de campagnes en don avec ou sans contrepartie et en prévente.
- La Banque de France : institution publique dont l’une des trois principales missions est le service à l’économie : traitement du surendettement, droit au compte, cotation des entreprises, médiation du crédit, accompagnement des TPE.
- Agrément ESUS : L’agrément Entreprise Solidaire d’Utilité Sociale (ESUS) est délivré aux sociétés dites de l’économie sociale et solidaire respectant une certain nombre de critères, notamment de poursuite d’utilité sociale. Il permet de bénéficier de financements dédiés ainsi que d’un dispositif de réduction d’impôt pour les investisseurs en capital.
Pourquoi les capitaux propres sont-ils décisifs ? Les conseils d’Antoine.
Une entreprise génère du chiffre d’affaires pour se développer. Mais au départ, et tout au long de son existence, elle a besoin de financements extérieurs pour assurer ses investissements.
À la création de l’entreprise, les associés investissent dans son capital social. Associé majoritaire, associé à parts égales, membre de la famille qui souscrit une simple action pour affirmer son soutien… Le capital social permet de mesurer l’implication de chaque associé dans l’affaire et donne droit à des dividendes. Il donne également droit de participer aux grandes orientations de la société, et notamment aux prises de décision en assemblée générale.
Le capital social est la première brique des ressources stables de l’entreprise.
Le reste de l’édifice se compose des capitaux propres, puis des fonds propres. Mais attention, toutes ces ressources ne sont pas définitivement acquises à l’entreprise et certaines devront par la suite en ressortir. Cela implique qu’elles seront considérées de manière différente comme nous allons le voir.
Que sont les capitaux propres ? Ce sont les ressources qui appartiennent à la société par opposition aux dettes vis-à-vis des créanciers (les fournisseurs et banques par exemple). Ils sont composés du capital social, des réserves (bénéfices ou pertes des années précédentes), du résultat de l’exercice, et des subventions d’investissements. Ainsi, en cas de résultats déficitaires trop importants, ils peuvent devenir négatifs. Et ceci est inscrit au greffe.
Conseil n°1 : Faites attention à ne pas investir un capital social initial trop faible. En particulier, les petites entreprises qui n’ont parfois que le capital pour absorber les pertes des premiers exercices.
Conseil n°2: Les réserves peuvent sortir de l’entreprise par distribution de dividendes aux associés. Soyez attentif à bien doser la part qui va être distribuée et la part conservée. Les banques regardent cette répartition. C’est important que l’entreprise garde bien des réserves pour consolider les capitaux propres et accompagner sa croissance.
Abordez ces deux sujets avec votre expert-comptable.
Les capitaux propres peuvent être complétés par des partenaires financiers. Lorsque ceux-ci entrent au capital, cela est comptabilisé en capitaux propres.
Les investisseurs peuvent intervenir de manière différente qu’en capital. Avec des outils tels que des titres participatifs, des obligations convertibles, des comptes courants d’associés bloqués, des prêts d’honneur des réseaux tels que Réseau entreprendre, France Active ou Initiative France (ceci n’est pas une liste exhaustive). Ils ne sont pas comptabilisés en capitaux propres, mais ce sont des ressources stables. Ces derniers, cumulés aux capitaux propres correspondent aux fonds propres.
Les fonds propres sont un indicateur de solidité financière, mais il ne faut pas les confondre avec les capitaux propres. Le montant de la différence entre les deux va être remboursé par l’entreprise aux investisseurs.
C’est ce qu’explique notre emprunteur Julien de la Cité Fertile. Il parle d’argent fluide pour évoquer les comptes courants d’associés.
En effet, les comptes courants d’associés sont de l’argent prêté par les associés et dont ils peuvent demander le remboursement. Ce prêt d’associés peut être bloqué sur une durée déterminée, mais même dans ce cas le tribunal de commerce ne les considère pas comme capitaux propres.
En cas d’années déficitaires, les capitaux propres se dégradent, et si les capitaux propres sont inférieurs à la moitié du capital social, le code du commerce impose aux associés de l’entreprise de se réunir pour décider de dissoudre la société ou maintenir l’activité. Si la dissolution est écartée, la société a deux ans pour remettre les capitaux propres à niveau. Et cette décision apparaît au registre du greffe consultable par tous. Cela peut renvoyer une mauvaise image aux fournisseurs et aux banques.
Pour conclure, même si l’entreprise a convaincu de beaux partenaires en fonds propres et a la certitude que l’activité va décoller, mieux vaut avoir des inscriptions au greffe saines et anticiper des capitaux propres suffisants afin de pouvoir continuer à convaincre les banques
Cependant, les fonds propres d’une société sont à regarder par rapport à d’autres éléments de son bilan. En ce qui concerne son niveau d’endettement, le ratio « niveau d’endettement » sur « fonds propres » est intéressant à observer. Plus ce ratio sera faible et plus il sera facile d’avoir recours à de nouveaux emprunts pour financer le développement de son activité.
Rassurez-vous, l’entrepreneur dispose de nombreux leviers pour redresser la situation :
Faire des résultats positifs, convertir les comptes courants d’associés en capital, investir des fonds supplémentaires, faire entrer des investisseurs en capital, obtenir des subventions d’investissement, etc.
Conseil n°3 : Pour attirer des investisseurs en capital, vous pouvez mettre en avant des dispositifs de déduction fiscale sur l’impôt sur le revenu favorisant les souscriptions en capital d’entreprises, il en existe différents types notamment le Madelin qui concerne les TPE et PME françaises et les entreprises agréées ESUS.
Pour finir, nous vivons une belle époque pour constituer des capitaux propres, notamment grâce aux plateformes de financement participatif, telle que Zeste par la Nef. De nombreuses sociétés y ont recours pour étoffer leur capitaux propres grâce aux dons de leur entourage proche, lointain et des contributeurs de la plateforme et aux options de prévente, proposées par certaines plateformes. Ces campagnes s’inscrivent comptablement en produits mais participent indirectement à la constitution des capitaux propres via les réserves permises par les résultats. Pensez-y !