Après avoir évoqué avec vous le sujet des taux d’intérêt lors de la dernière newsletter, nous vous proposons cette fois ci un éclairage sur la notion de garantie liée à un projet. Pourquoi une banque prend elle des garanties? Est ce que la Nef se différencie des banques classiques dans ce domaine?
Quand une banque, qu’elle qu’en soit sa taille, octroie un crédit à un professionnel, une entreprise, une association, elle lui prête une somme définie sur une période définie. Mais cet argent qu’elle prête, comme vous le savez, ce n’est pas le sien. C’est celui des épargnants, qui lui ont confié, comptant bien sur elle pour en disposer quand ils le souhaitent. Ainsi, l’argent que prête la banque doit nécessairement à un moment lui revenir, afin qu’elle puisse le mettre à disposition de l’épargnant à sa demande.
Alors, dans ce contexte, comment prendre des risques et financer des projets entrepreneuriaux, dont on sait bien que tous ne réussiront pas, “qu’il y aura de la casse”? Et bien la banque peut décider de prêter cet argent et sollicite, soit auprès du porteur de projet, soit auprès d’un tiers, une garantie. Celle-ci lui permet ainsi de limiter le risque qu’elle prend unitairement sur chaque montant prêté, et d’assurer globalement que chaque épargnant retrouvera son argent.
S’agissant des professionnels, il existe de nombreux types de garanties, mais 3 sont les plus majoritairement utilisés:
Ces trois types de garantie peuvent parfois se cumuler, les banques cherchant parfois à se couvrir plus ou moins en fonction des projets. Et dans la pratique, sans verser dans les clichés, un entrepreneur qui crée son activité dans un domaine que connaît peu la banque se verra demander un niveau de garantie important, la banque ne souhaitant pas porter trop de risque. A l’inverse, l’entrepreneur client de longue date de sa banque, dont l’entreprise est florissante, pourra obtenir un prêt sans difficulté avec un niveau de garantie bien plus faible.
Au risque d’en décevoir certains, la Nef n’a pas révolutionné ces pratiques, quoi qu’on verra ci-dessous qu’elle a tout de même innové. Il est clair que la Nef aura une approche similaire consistant à limiter son risque sur des projets dont la visibilité est très faible, et à limiter les garanties pour les prêts de ses clients récurrents, qu’elle connait bien et dont elle connaît bien le marché. Car bien entendu, La Nef comme les autres doit avant tout assurer aux sociétaires épargnants de la coopérative de retrouver leurs sous.
Une fois dit cela, il y a tout de même des différences entre Nef et banque classique. La première est que la Nef n’octroie pas de prêts sur la seule base d’une garantie solide. C’est le projet avant tout. Si on estime qu’il existe un risque de non remboursement trop important, que la garantie apportée soit bonne ou pas, la Nef refusera le dossier.
Ensuite, la Nef finance, depuis sa création il y a 30 ans, à 50% des porteurs de projet en phase de création d’entreprise. Ce qui n’est pas du tout le cas des banques. Et vous le savez bien mieux que nous, la phase de création, et même les 3 premières années de vie de l’entreprise, le risque de défaut est très important. Ainsi, avec un niveau de garantie raisonnable (souvent elle fait appel à un fonds de garantie), elle n’hésitera pas à faire confiance.
On peut ajouter enfin qu’à la différence de nombreuses banques, la Nef est assez spécialisée sur les secteurs d’intervention qu’elle accompagne. Elle finance les domaines écologiques, sociaux et culturels (et uniquement ceux-ci) depuis 30 ans. Une expertise sur certains marchés est donc naturellement née et s’est transmise. L’appréhension du risque sur des marchés tels que la filière biologique, l’insertion, les énergies renouvelables, pour ne citer qu’eux, est ainsi très différente des autres car bien mieux maîtrisée. Et cette maîtrise donne de la visibilité sur les projets et leur viabilité. Tout cela concourt à limiter les garanties prises dans ces domaines.
Pour finir, une note positive pour vous dire que même sur ce sujet très réglementé des garanties de prêts bancaires la Nef tente des choses. Deux exemples pour illustrer cela.
Au début des années 80, non seulement il était difficile pour un entrepreneur alternatif de se faire financer par une banque, mais en plus les dispositifs actuels de fonds de garantie n’existaient pas. Et bien la Nef avait créé un dispositif de cautionnement solidaire permettant à toutes les parties de limiter leurs risques : un entrepreneur, pour emprunter à la Nef, mobilisait sa communauté (famille, amis, clients,…) autour de lui. Chaque personne se portait caution pour un montant limité, en lien avec ses moyens. L’addition de ces dizaines de petites cautions permettait à l’emprunteur de réunir assez de garantie pour que la Nef lui prête. La Nef pouvait financer car le risque était limité (mais jamais nul, la banque prend toujours une part de risque), l’emprunteur justifiait auprès d’elle que son projet avait du sens car des dizaines de personnes croyaient en celui-ci, et concernant les cautionnaires, chacun s’étant engagé pour une petite somme, il n’y avait pas de risque de mettre ces derniers en difficulté eux-mêmes. Ce système a perduré longtemps et a permis à de nombreux porteurs de projet de se financer auprès de la Nef.
Et plus récemment, toujours dans un esprit pionnier, la Nef a signé il y a 2 ans avec le Fonds Européen d’Investissement le premier dispositif de fonds de garantie dédié aux entrepreneurs sociaux. Aujourd’hui décliné dans plusieurs autres pays européens, ce fonds, permettant d’accéder à une garantie gratuite, a d’abord été testé avec la Nef.
Ivan Chaleil, Directeur Commercial